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La pile de Volta

En cherchant à augmenter la charge électrique produite par le contact de deux métaux différents et à reproduire la décharge de la torpille, Volta expérimente toutes sortes d'alternances de métaux et de conducteurs divers. C'est en empilant alternativement des séries de disques dans l'ordre suivant: zinc, argent, carton humide, zinc, argent, carton humide… qu'il parvient à ses fins. Il écrit à la Royal Society de Londres en 1800: "Cet appareil semblable dans le fond à l'organe électrique de la torpille, je voudrais l'appeler organe électrique artificiel". En effet, lorsque l'on touche avec chaque main les extrémités de la pile ainsi formée, on ressent une secousse identique à celle provoquée par la torpille.

Mais le fait le plus étonnant, c'est l'action, ou impulsion perpétuelle, sur le "fluide électrique": la pile peut agir indéfiniment, semble-t-il, sans qu'il soit besoin de la recharger comme une bouteille de Leyde ou de produire un frottement, comme dans la machine électrique.

"Il y en aura pour occuper l'anatomiste, le physiologiste et le praticien [c'est-à-dire le médecin]", prédit Volta dans la lettre annonçant sa découverte. De fait, les médecins vont appliquer aussitôt le nouvel appareil aux asphyxiés, aux noyés, et à tous les malades qui avaient déjà bénéficié (et souffert) des décharges de la bouteille de Leyde. Cependant, ce sont surtout les chimistes, puis les physiciens qui vont tirer bénéfice de la pile de Volta, cette source d'électricité qui semble se recharger d'elle-même.

Membre de l'Académie des sciences, Bonaparte a perçu l'importance de cette découverte. Particulièrement impressionné par la fusion de tiges métalliques obtenue grâce à la pile, il invite Volta à présenter sa merveilleuse invention à Paris. Le Premier consul lui accordera en 1801 une pension et le fera comte et sénateur du royaume d'Italie.

Pourtant, la tension de contact entre deux métaux différents, dans laquelle Volta voyait la cause des effets de la pile, ne joue qu'un rôle négligeable. Les chimistes découvriront rapidement que les réactions qui ont lieu entre chaque métal et le conducteur humide d'une pile électrique jouent un rôle essentiel dans la circulation du courant. Par ailleurs, la pile est loin d'être perpétuelle, comme l'écrivait Volta, car les réactions chimiques modifient peu à peu les faces métalliques. Après quelques heures, le courant s'arrête!

Dans les piles, la différence de potentiel de l'ordre d'un volt par élément (l'assemblage de deux métaux différents séparés par une solution), est multipliée par le nombre d'éléments. Elle est beaucoup plus faible que la tension fournie par les machines électriques (plusieurs dizaines de milliers de volts), mais les quantités d'électricité qui y sont mises en jeu sont beaucoup plus importantes que dans les machines électriques.

À peine la découverte de Volta annoncée, deux chimistes anglais, William Nicholson et Anthony Carlisle, observent que deux fils métalliques reliés aux extrémités de la pile et plongés dans l'eau s'entourent de bulles de gaz: hydrogène sur l'un, oxygène sur l'autre. L'eau est décomposée en ses éléments.

Les sels en solution, les corps fondus sont alors soumis les uns après les autres à l'action du courant électrique. Grâce à une pile de 20000 plaques remplissant la cave de la Royal Institution de Londres, Humphrey Davy réussit à décomposer la soude et la potasse, considérées jusqu'alors comme des corps simples. De nouveaux métaux apparaissent: sodium, potassium, baryum… C'est le début de l'électrochimie. D'abord préparateur de Davy, puis son successeur, Michael Faraday étudie dans les années 1830 les règles de ces décompositions par l'électricité, qu'il baptise "électrolyses". Il crée les mots "électrode" ("anode" et "cathode") pour les tiges de métal qui plongent dans la solution, "anion" et "cation" pour les constituants de l'électrolyte décomposé.

Faraday observe que la quantité de matière décomposée ne dépend pas de la forme des électrodes, ni de la concentration de la solution. Seule compte la quantité d'électricité qui traverse la solution: la quantité de matière déposée aux électrodes est proportionnelle à la quantité d'électricité qui traverse le circuit.

En faisant passer successivement le même courant dans deux cuves contenant des solutions différentes, puis en comparant les masses de produits décomposés, il remarque que ces masses sont exactement proportionnelles aux équivalents chimiques des éléments correspondants (c'est-à-dire aux masses atomiques). Autrement dit, les corps sont décomposés par l'électricité selon les mêmes rapports que dans les combinaisons chimiques. Les conclusions renforcèrent l'idée que la liaison chimique est due à des forces électriques, hypothèse qui fut confirmée à la fin du XIXe siècle.

Après une électrolyse assez longue, les électrodes sont modifiées en surface, l'anode étant toujours oxydée. Plusieurs physiciens remarquèrent, en outre, que la cuve à électrolyse pouvait, après avoir été séparée de la pile, faire circuler à son tour un courant dans un circuit. En 1859, Gaston Planté tire de cette expérience de laboratoire un procédé pour construire un "accumulateur": des plaques de plomb plongées dans l'acide sulfurique sont soumises à une série d'électrolyses. À la fin du processus, les plaques anodes sont profondément oxydées, et le système est devenu une pile qui peut fonctionner assez longtemps. De nouveau relié à une pile, l'accumulateur peut être "rechargé". Ainsi les accumulateurs au plomb, qui constituent les batteries des automobiles, sont-ils rechargés en permanence par le courant produit par l'alternateur.

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